Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/254

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« Au maire du XIXe. »

C’est moi, le maire — puisque j’ai l’écharpe ! Je décachette et je lis : « Tout est rentré dans l’ordre, sans effusion de sang. »


C’est le moment de détaler. Je tombe de faim, je crève de soif.

J’entre, écrasé, las, sommeillant, dans le restaurant où nous allions casser une croûte avec les collègues, vers midi. Je retrouve ceux qui n’ont pas paru de la nuit — ayant peur de moi ou attendant la fin pour se décider.

La fin, c’est mon arrestation à bref délai, sans doute. Peut-être vais-je même être cueilli avant d’avoir mangé mon omelette.


Oh ! les pauvres gens ! ils plongent leur nez dans leur assiette, font mine de ne pas me voir, me ferment la table en serrant les chaises.

Je les aborde.

— On va venir m’empoigner comme insurgé, comme voleur. Je vous prendrai à témoin.

Ils ne me laissent pas terminer.

— Hé !… Hum !… Dame !… Quoi !… Enfin !… Après tout, vous n’étiez pas forcé de vous emparer de la mairie. Vous avez peut-être sauvé Richard en l’écartant de la foule, mais si vous n’aviez pas pris sa place elle n’aurait pas pensé à l’étrangler… On