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Page:Vallory - Un amour vrai.pdf/217

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l’Opéra… dans une avant-scène, aux premières représentations ; ils sont fiers de faire stationner leur coupé en plein jour devant leur porte. Les feuilletonistes du lundi, qui Cherchent partout du nouveau pour en emplir, vaille que vaille, le rez-de-chaussée de leur journal, s’empressent d’annoncer au public ennuyé l’apparition de cette étoile entrevue par eux dans le ciel de minuit de quelque jardin public. Les poètes affamés leur dédient des sonnets. Les auteurs inconnus, qui veulent lancer leurs ouvrages, se hâtent de les mettre sous leur patronage, dans une ébouriffante préface. Les spéculateurs littéraires écrivent soi-disant les mémoires de ces dames sous leur dictée ; aussitôt leurs petits livres sont traduits en toutes les langues vivantes, et courent le monde du pôle nord au pôle sud.

Ces beautés, quelquefois sans beauté, mais qui ont eu le talent ou la chance de mettre leur bonnet d’une certaine façon sur le coin de l’oreille, ou bien d’inventer à Mabille une audacieuse pirouette qui a ému leur public, s’appellent tour à tour Mogador, Pomaré, Marie Duplessis, Rigolboche, Gambilmuche que sais-je encore ? Chacun se demande : D’où viennent-elles ? qu’ont-elles de remarquable ? pourquoi sont-elles à la mode ? Personne ne répond ; personne n’en sait rien. Puis… elles s’évanouissent comme des bulles de savon, elles s’en vont…… où s’en sont allées leurs devancières, dormir sous les neiges d’antan.