Page:Van Hasselt - Les Quatre Incarnations du Christ, 1867.djvu/139

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Murmurant un lambeau de prière ou d’antienne,
Il dirige ses pas vers la porte d’Étienne.
Du val de Josaphat il prend l’âpre sentier,
Et, par son rêve obscur absorbé tout entier,
Suit le chemin pierreux qui mène à Béthanie.
Puis il monte au jardin qui vit ton agonie,
Ô Christ, sur la montagne où les gras oliviers
Mêlent leurs rameaux noirs, pleins de vols d’éperviers.
Là, du côté du mont dressé sur la vallée
Que creusa le Cédron de son onde écoulée,
Il s’assied au penchant d’un roc, cap de granit
Que l’occident avec ses chauds rayons jaunit.
À ses pieds, les tombeaux d’Étienne et de Marie,
Gethsémané qui pleure et Siloé qui prie,
Et la cité plus haut, que, combattants fiévreux,
Les Turcs et les Chrétiens se disputent entre eux.
Il regarde un instant cette vaste tempête,
Et contemple la ville, en secouant la tête.
Puis, tandis que du fond de son cœur plein de deuil,
Une larme jaillit et perle dans chaque œil :
« — Mon Dieu ! murmure-t-il, le passé qui s’efface
« Et moi, nous devions-nous retrouver face à face ?
« Je le croyais éteint dans un oubli profond.
« Voilà que devant moi dix siècles se refont.
« Je remonte avec eux ce chemin de souffrance,