Page:Van Hasselt - Les Quatre Incarnations du Christ, 1867.djvu/47

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judas.

Aussi, vois-tu, depuis la porte du prétoire,
J’ai refait, cette nuit, la route expiatoire,
Et suivi pas à pas tout le chemin sanglant
Que le Christ arpenta de son pied chancelant.
Pèlerinage affreux ! Car, sur toutes les pierres
Et sur tous les cailloux semés dans les ornières,
Ayant peur de moi-même et d’horreur frémissant,
J’ai cherché, j’ai trouvé les traces de son sang.
Le long du noir sentier j’en ai compté les gouttes.
De mes lèvres j’aurais voulu les baiser toutes ;
Et, dans l’obscurité, je les ai par moments
Cru voir étinceler comme des diamants.
Et maintenant autour de moi tout semble rouge.
Du rocher immobile au nuage qui bouge,
Tout prend cette couleur, ton lugubre et profond.
Tout est rouge partout où mes prunelles vont.
Tout est rouge. On dirait que les étoiles mornes
Sont des taches de sang dans l’espace sans bornes ;
Et, quand je rentre en moi, je vois dans mon esprit
Ruisseler à grands flots le sang de Jésus-Christ.
Hélas ! fut-il jamais de vision pareille ?
J’ai son sang dans les yeux !…