Page:Variétés Tome VI.djvu/258

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teration autant approchée de sa raison ordinaire, que son anxieté estoit extravaguante : d’où vint qu’il ne peut pas retenir la bonde d’un tonneau d’injures qui scandalisèrent fort la procureuse, non pas sans reverberation. De là je retrograday, car j’avois passé pardevant la Croix de fer7. Estant en cet endroit, j’apperceu une certaine lumière ; et quoy que j’apprehende fort les ardants8, je ne laissay de m’en approcher. Ce qui m’esmeut à la charité fut la cruauté barbaresque d’un, lequel, estant bien Fourré9, ressembloit la damoiselle qui, après s’estre bien chauffée, n’avoit plus froid. C’estoit au temps (je m’en souviens) que le soleil estoit au signe d’Aquarius : et encor que l’on die que nos esprits sont impassibles, et par consequent qu’ils ne sont susceptibles au froid, je ne laissay d’en sentir quelque chose, d’où j’inferay que les pauvres clercs (que je puis


7. La Croix de fer étoit un cabaret situé rue Saint-Denis, près de Saint-Leu. On peut lire dans les poésies de Colletet un sonnet sur un dîner à la Croix de fer, et consulter aussi les poésies de Jean de Schelandre. Il ne faut pas confondre cette maison avec celle qui avoit la même enseigne rue de La Harpe, et derrière laquelle se trouvoient les restes des Thermes de Julien.

8. Les chandelles. Mot du dictionnaire des Précieuses : « Inutile, ostez le superflu de l’ardent. » C’est ainsi, selon Somaize, qu’on disoit : « Laquais, mouchez la chandelle. » Par une rencontre singulière, le même mot se retrouve avec le même sens dans une autre langue factice, mais d’une autre espèce, dans l’argot. (Francisque Michel, Études de philologie comparée sur l’argot, p. 15.)

9. Jeu de mots sur le nom d’un procureur de ce temps-là.