Page:Variétés Tome VI.djvu/331

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aujourd’huy beaucoup de massacres et brigandages sus les pauvres marchands et voyageurs, et se faict beaucoup plus de volleries en ce temps de paix qu’il ne se faisoit tandis que nous avions la guerre.

Le Marchand.

Comment cela ?

Le Soldat.

Je vous le diray. Sçavez-vous pas que Mars, dieu de la guerre et cruaulté, se sert aussi aucunes fois et volontiers de ministres barbares et cruels ? De sorte qu’à ce propos l’on dit communement que l’homme de bien qui abhorre le sang et est pourveu d’une parfaicte humanité ne vault rien à la guerre. Ainsi donc pouvez-vous juger de là que les meschans garnemens volontiers s’y retirent, et que la guerre, où neantmoins se font les braves hommes, est ordinairement la retraicte des voleurs4, meurtriers et assassinateurs, pour ce qu’en temps de guerre le marchand ne va plus sur les champs, et que chacun se tient clos et fermé en sa maison ; ce qui fait que les meschans, ne trouvans plus aucunes prati-


4. C’est ainsi, après les guerres, qu’on vit un peu plus tard paroître Guillery et sa bande. Ils se jetoient sur les marchands, qui, la paix étant signée, croyoient pouvoir aller en toute sécurité par les chemins. Selon L’Estoille (fin sept. 1608), « ils avoient pris pour devise, qu’ils avoient affichée en plusieurs arbres des grands chemins : Paix aux gentilshommes ! la mort aux prevosts et archers, et la bourse aux marchands ! ce qu’ils ont réellement executé maintes fois, ayant tué tous les prevôts et archers qui etoient tombés entre leurs mains et devalisé les marchands. »