Aller au contenu

Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/205

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vulnérabilité de l’ennemi nous donne en tout cas la certitude d’en être débarrassés à la première gelée… »

Paris sous la neige ?… Mon œil de peintre caresse le panorama souverain que je découvre du haut du square. Au lieu de ces miroitements de vitres, de ces scintillements de coupoles dorées, de ce Paris en polychromie tendre, aux valeurs délicatement fondues dans le beau matin d’automne, j’évoque l’infinie blancheur de la neige aux ombres bleues, sous un ciel d’antimoine…

Je hausse les épaules en rejetant l’amas des feuilles froissées… La première gelée ! Et nous sommes au 22 octobre… Encore un mois, deux peut-être. C’est bien lointain, et d’ici là…

Et soudain je cesse de m’intéresser aux événements ; je me secoue comme un chien qui sort de l’eau, rejetant l’âme sociale pour dégager mon seul égotiste personnage : Gaston Delvart, le peintre amoureux de l’ange astronaute.

Neuf heures moins un quart. Temps de lui téléphoner. Abandonnant tous mes journaux à la vieille femme à cabas qui les guigne, venue s’asseoir au bout de mon banc, je retourne au débit de la rue du Mont-Cenis, où il y a le téléphone.

— Allo. Oui, ici, Aurette… Bonjour, cher ami !… Me retrouver ? Hélas, non, pas aujourd’hui, impossible. Mon père… je ne puis pas le quitter ; nous avons un