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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/290

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D’une voix étrange, comme automatique, elle interroge :

— La catastrophe est arrivée, monsieur Nathan ?

Le membre de l’Institut, relève le front, puis l’incline en un signe d’assentiment.

— Oui, mademoiselle, le nouvel Edison a rejoint dans l’immortalité les plus glorieux martyrs de la science.

— Oh ! c’est donc pour cela qu’il m’a éloignée au moment décisif… qu’il a éloigné le Dr Alburtin et les garçons de laboratoire… Il prévoyait… Il savait…

Et comme elle se tait, pâle, absente, les yeux agrandis d’une mortelle tristesse, il reprend :

— Mademoiselle, ma voiture est à votre disposition… et vous aussi, monsieur Delvart, si vous voulez…

Mais je n’eus que le temps de la soutenir. Elle est tombée dans mes bras, sanglotante, Et entre ses sanglots, je perçois des paroles qui ouvrent dans ma tristesse sympathique une tranchée resplendissante de bonheur :

— Mon Gaston bien-aimé, je suis à toi ; je n’ai plus que toi au monde…

Instant magnifique ! Je n’ai pas eu à lui annoncer que le mariage de Cheyne la libère. D’elle-même elle renonce aux intérêts qui la lient encore, croit-elle, à son ex-fiancé ; elle jette par-dessus bord le contrat qui doit la faire riche ; elle me sacrifie sa fortune. Elle me donne la preuve d’un amour que seul refoulait son amour filial…