Page:Vasari - Vies des peintres - t1 t2, 1841.djvu/789

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Lysippe fit ses célèbres hippomachies, ses colosses, hauts de trente et de quarante coudées, que Pline compare à des tours. C’est alors que son élève Charès de Lydie dota de son fameux colosse l’île de Rhodes où, assure Pline, l’on en comptait cent autres de bronze dont chacun aurait suffi à la gloire d’une ville.

Après la mort d’Alexandre, l’art grec, inquiet et maladif, attendit que les Apollonius, les Agésias, les Glycas vinssent lui rendre, sinon son entière vigueur, au moins une partie de son éclat. De Périclès à Alexandre, la Grèce avait été le théâtre de combats continuels ; mais l’amour de la liberté en avait été la principale cause. Aussi ces luttes acharnées, loin de châtrer la puissance créatrice, ne firent que hâter sa splendide efflorescence, et aiguillonner profondément toutes les énergies ; sous le ciseau de l’artiste, de célestes éclairs sillonnaient le marbre et l’airain destinés à éterniser les héros de la patrie, les gloires de la nation. Pourquoi, au contraire, dans les guerres qui suivirent le partage des dépouilles du lion macédonien, le génie grec traîna-t-il languissamment ses ailes ? C’est qu’il n’était plus soutenu par le souffle inspirateur et vivifiant de la liberté ; c’est que l’haleine fétide de la servitude empoisonnait les arts.

L’art, contraint de s’expatrier, chercha un refuge à la cour des Lagides, en Asie, où déjà, sous le sabre du conquérant, la philosophie grecque s’était mariée au dogme oriental. Alexandrie fut pour l’art une nouvelle Athènes. Ptolémée Philadelphe l’y ac-