Page:Verhaeren - Les Rythmes souverains, 1910.djvu/90

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Bien qu’il ne vît autour de lui
Que des mains en fureur se crisper dans la nuit
Et des gestes armés de crosses
Le menacer, soudain, de vengeances féroces
Jusqu’au delà de son tombeau,
Bien que le monde entier pesât sur son cerveau
Avec ses vieux décrets et ses vieux anathèmes,
Rien n’empêcha Martin Luther
Devant l’aube du matin clair
De penser par lui-même.

Il libéra le monde, en étant soi, pour tous.

Comme une forteresse, il maintenait debout,
Près de son cœur, sa conscience.
La bible était pour lui, non pas une prison,
De textuelle obédience,
Mais un jardin bougeant sous l’or des frondaisons
Où chaque homme, selon son âme,
Choisit la fleur qu’il aime et mord au fruit qu’il veut
Et sous le ciel ardent de flammes