Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/142

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En un taillis bougeant de gestes et de pas ;
Et que la salle, avec son lustre au centre,
Et ses velours lourds et replets
Et ses balcons en bourrelets
S’étale ainsi qu’un ventre.

Des bataillons de chair et de cuisses en marche
Grouillent, sur des rampes ou sous des arches ;
Jambes, hanches, gorges, maillots, jupes, dentelles,
— Attelages de rut, où par couples blafards
Des seins bridés mais bondissants s’attèlent, —
Passent, crus de sueur ou bleus de fard ;
Des mains vaines s’ouvrent et se referment vite,
Sans but, sinon saisir l’invisible désir
En fuite ;
Une sauteuse, la jambe au clair,
Raidit l’obscénité dans l’air ;
Une autre encor, les yeux noyés et les flancs fous,
Se crispe, ainsi qu’une bête qu’on foule.
Et la rampe l’éclaire et bout par en-dessous
Et toute la luxure de la foule
Se soulève vers elle et l’acclame, debout.