Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/143

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Ô le blasphème en or criard, qui, là, se vocifère !
Ô la brûlure à cru sur la beauté de la matière !
Ô les atroces simulacres
De l’art blessé à mort que l’on massacre !
Ô le plaisir qui chante et qui trépigne
Dans la laideur tordue en tons et lignes ;
Ô le plaisir humain au rebours de la joie,
Alcool pour les regards, alcool pour les pensées,
Ô le pauvre plaisir qui exige des proies
Et mord des fleurs qui ont le goût de ses nausées !
 
Jadis, il marchait nu, héroïque et placide,
Les mains fraîches, le front lucide,
Le vent et le soleil dansaient dans ses cheveux ;
Toute la vie harmonique et divine
Se réchauffait dans sa poitrine ;
Il la respirait fruste et l’expirait plus belle ;
Il ignorait la loi qui l’eût dressé : rebelle ;
Et l’aube et les couchants et les sources naïves
Et le frôlement vert des branches attentives,
Par à travers sa chair donnaient à son âme profonde,