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les apparus dans mes chemins


Voici le lieu des pus et des tumeurs ; voici.
À mes arbres de lèpre, au bord des mares,
Sèchent ton cœur et tes loques baroques,
Vieux Lear ; et puis voici le noir Hamlet bizarre
Et les corbeaux qui font la cour à son cadavre ;
Voici René, le front fendu, les chairs transies,
Et les mains d’Ophélie, au bord des havres,
Sont ces deux fleurs blanches — moisies.

Et les meurtres me font des plans de pourriture,
Sur l’escalier de rocs, qui mène aux dictatures
De mon pays de purulence et de sang d’or.

Sont là, les carcasses des empereurs nocturnes,
Les Nérons fous et les Tibères taciturnes,
Les rois d’ébène et de portor.
Leur crâne est chevelu de vers — et leur pensée
Qui déchira la Rome antique en incendies
Fermente encor, dans leur orbite usée ;
Des lémures tettent les pustules du ventre,
Qui fut Vitellius — et fiels et maladies
Crèvent, sur ces débris, leurs fleuves de poison.

Je suis celui du pays mou des morts.....