Page:Verhaeren - Rembrandt, Laurens.djvu/32

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En 1634, — à la suite d’on ne sait quelles occurrences heureuses, — il épouse, lui, fils de meunier, lui plébéien de race, dont le père n’a aucun nom, si ce n’est celui de fils de Gerrits, une patricienne frisonne, Saskia van Uylenburgh. Celle-ci compte parmi ses parents des magistrats, des écrivains, des pasteurs et même un peintre, Wybrand de Geest, représenté par une œuvre bonne au musée de Stuttgart. Saskia fut orpheline fort jeune. Une de ses six sœurs mariées la recueillit. Elle se maria quand elle eut l’âge de vingt-deux ans.

Avec quelle allégresse, quel emportement, quelle folie, Rembrandt dut la recevoir dans sa maison de Bloemengracht où des élèves déjà nombreux témoignaient de sa maîtrise et remplissaient son atelier ! Les fêtes devaient succéder aux fêtes comme les jours de joie aux jours de fièvre. La mesure et la règle si inviolables pour les bourgeois amsterdamois n’existaient pas pour cette famille d’artistes, unis entre eux et dominés par un génie naissant. Tous inauguraient et pour eux et pour lui le règne volontairement accepté, comme un joyeux despotisme, d’une reine fraîche, ardente et toute tendue vers l’amour et ses triomphes.

On connaît Saskia van Uylenburgh. Elle a pris rang dans l’art comme s’y sont imposées la Fornarina de Raphaël, l’Hélène Fourment de Rubens et la maîtresse de Titien. Un de ses premiers portraits (vers 1633) est au musée de Cassel. Et la voici déjà parée comme une princesse avec son grand chapeau d’un rouge assourdi,