Page:Verne - Famille-sans-nom, Hetzel, 1889.djvu/211

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« Cela est sage, répondit l’Indien, et puisque mon frère accepte, qu’il reçoive en gage de son acceptation le tomahawk du grand chef, appelé par le Wacondah à chasser dans les prairies heureuses, et qu’il le passe à sa ceinture ! »

Maître Nick dut prendre l’arme favorite des tribus indiennes, et, tout déconfit, comme il n’avait point de ceinture, il la posa piteusement sur son épaule.

La députation fit alors entendre le « hugh » traditionnel des sauvages du Far-West, sorte d’exclamation approbative, en usage dans le langage indien.

Quant à Lionel, il ne se possédait pas de joie, bien que son patron lui parût particulièrement embarrassé d’une situation qui prêterait à rire dans la confrérie des notaires canadiens. Avec sa nature de poète, il entrevoyait déjà qu’il serait appelé à célébrer les hauts faits des Mahogannis, à mettre en vers lyriques le chant de guerre des Sagamores, avec la crainte, toutefois, de ne pas trouver une rime à tomahawk.

Les Hurons allaient se retirer, tout en regrettant que maître Nick, empêché par ses fonctions, n’eût pas abandonné la ferme pour les suivre, lorsque Catherine eut une idée, dont le notaire ne lui sut aucun gré, sans doute.

« Mahogannis, dit-elle, c’est une fête de mariage qui nous réunit en ce jour à la ferme de Chipogan. Voulez-vous y rester en compagnie de votre nouveau chef ? Nous vous offrons l’hospitalité, et, demain, vous prendrez place au festin, dans lequel Nicolas Sagamore occupera le siège d’honneur ! »

Un tonnerre d’applaudissements éclata, lorsque Catherine Harcher eut formulé son obligeante proposition, et il se prolongea de plus belle, lorsque les Mahogannis eurent accepté une invitation qui leur était faite de si bon cœur.

Quant à Thomas Harcher, il n’aurait qu’à augmenter la table de noce d’une cinquantaine de couverts — ce qui n’était pas pour l’embarrasser, car la salle était vaste, et même plus que suffisante pour ce surcroît de convives.