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« Pour rien, cette fois ! Les imbéciles ! les idiots ! ils m’ont conduit pour rien ! »

Tout l’homme était dans ces mots. Pour rien ! On lui avait rendu service « pour rien ! »

L’île Gourbi était maintenant et définitivement abandonnée des hommes. Il ne restait plus rien sur ce dernier lambeau d’une colonie française, à part les animaux de poil et de plume qui avaient échappé aux traqueurs, et que le froid allait bientôt anéantir. Les oiseaux, après avoir essayé de trouver au loin quelque continent plus propice, étaient revenus à l’île, — preuve incontestable qu’il n’existait ailleurs aucune terre qui les pût nourrir.

Ce jour-là, le capitaine Servadac et ses compagnons prirent solennellement possession de leur nouveau domicile. L’aménagement intérieur de Nina-Ruche plut à tous, et chacun se félicita d’être si confortablement et surtout si chaudement logé. Seul, Isac Hakhabut ne partagea pas la satisfaction commune. Il ne voulut même pas pénétrer dans les galeries du massif et resta à bord de sa tartane.

« Il craint sans doute, dit Ben-Zouf, qu’on ne lui fasse payer son loyer ! Mais bah ! Avant peu, il sera forcé dans son gîte, ce vieux renard, et le froid le chassera hors de son trou ! »

Le soir, on pendit la crémaillère, et un bon repas, dont les mets furent cuits au feu volcanique, rassembla tout ce petit monde dans la grande salle. Plusieurs