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dix heures en chasse.

curieux à observer : les uns sérieux dans l’attente du lendemain, les autres gais, loquaces, ravageant déjà en paroles toutes les réserves de la commune d’Hérissart.

Il y avait là une demi-douzaine des plus distingués fusils de la capitale picarde.

Je les connaissais à peine. Aussi l’ami Brétignot dut-il me présenter dans les formes.

Ce fut d’abord à Maximon, un grand sec, le plus doux des hommes dans les conditions ordinaires de la vie, mais féroce dès qu’il avait un fusil sous le bras, — un de ces chasseurs dont on dit qu’ils tueraient un de leurs compagnons plutôt que de revenir bredouilles. Lui, Maximon, ne parlait pas : il s’absorbait dans ses hautes pensées.

Près de cet important personnage, se trouvait Duvauchelle. Quel contraste ! Duvauchelle, gros, court, entre cinquante-cinq et soixante ans ; sourd à ne pas entendre la détonation de son arme,

mais qui n’en réclamait que plus rageusement tous les coups douteux. Aussi lui avait-on fait tirer, plus d’une fois, un lièvre déjà mort avec un fusil non chargé, — une de ces mystifications de chasseurs, qui égayent pendant six mois la conversation des cercles ou des tables d’hôte.

Je dus subir aussi la vigoureuse poignée de main de Matifat, grand conteur d’exploits cynégétiques. Il ne parlait jamais d’autre chose. Et quelles interjections ! quelles onomatopées ! Le cri du perdreau, l’aboiement du chien, la détonation du fusil ! Pan ! pan ! pan ! — Trois « pan » pour un fusil à deux