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sacratif.

même acharnement. Arriver à la soute aux poudres, il n’y fallait plus songer.

D’ailleurs, partout les pirates l’emportaient par leur nombre. Une barrière, faite des corps de leurs camarades blessés ou morts, les séparait seulement de l’arrière de la Syphanta. Les premiers rangs, poussés par les derniers, franchirent cette barrière, après l’avoir rendue plus haute encore, en y entassant d’autres cadavres. Puis, foulant ces corps, les pieds dans le sang, ils se précipitèrent à l’assaut de la dunette.

Là s’étaient rassemblés une cinquantaine d’hommes, et cinq ou six officiers avec le capitaine Todros. Ils entouraient leur commandant, décidés à résister jusqu’à la mort.

Sur cet étroit espace, la lutte fut désespérée. Le pavillon, tombé de la corne de brigantine avec le mât d’artimon, avait été rehissé au bâton de poupe. C’était le dernier poste que l’honneur commandait au dernier homme de défendre.

Mais, si résolue qu’elle fût, que pouvait cette petite troupe contre les cinq ou six cents pirates qui occupaient alors le gaillard d’avant, le pont, les hunes, d’où pleuvait une grêle de grenades ? Les équipages de la flottille venaient toujours en aide aux premiers assaillants. C’était autant de bandits que le combat n’avait point affaiblis encore, lorsque chaque minute