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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

dans l’hôtel ?… Pourtant, les portes en étaient fermées, et personne ne les lui avait ouvertes…

Non, — et l’explication de sa présence ne tarda pas à nous être donnée. Myra descendait de sa chambre où Wilhelm Storitz l’avait rendue et laissée invisible. Alors que nous la croyions hors de l’hôtel, elle n’avait pas quitté son lit. Elle y était restée étendue, immobile, toujours muette et inconsciente, pendant ces vingt-quatre-heures. À personne n’était venue cette pensée qu’elle pouvait être là, et, en vérité, pourquoi cette pensée nous serait-elle venue ?

Sans doute, Wilhelm Storitz n’avait pu l’enlever aussitôt, mais il aurait parachevé son crime, si, ce matin même, le coup de sabre du capitaine Haralan ne l’en eût pour jamais empêché.

Et voici que Myra ayant recouvré la raison, — peut-être sous l’influence de cette liqueur que Storitz lui avait fait boire — Myra ignorante de ce qui s’était passé, depuis la scène de la cathédrale, Myra était au milieu de nous, nous parlant, nous voyant, n’ayant pu, dans l’obscurité, se rendre compte encore qu’elle ne se voyait pas elle-même.

Marc s’était levé, les bras ouverts comme pour la saisir…

Elle reprit :

— Mais qu’avez-vous donc ? Je vous parle, et vous ne me répondez pas. Vous paraissez surpris de me voir. Qu’est-il donc arrivé ?… Pourquoi maman n’est-elle pas là ? Serait-elle souffrante ?

La porte s’ouvrit de nouveau, et le docteur Roderich entra. Aussitôt, Myra de s’élancer vers lui — nous le supposions du moins — car elle s’écria :

— Ah ! mon père !… Qu’y a-t-il donc ?… Pourquoi mon frère, mon mari ont-ils cet air étrange ?

Le docteur s’était arrêté, pétrifié, sur le seuil. Il avait compris.

Cependant Myra était près de lui. Elle l’embrassait et répétait :

— Qu’y a-t-il ?… Maman ?… Où est maman ?