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la prison du missouri.

appris que le commodore Urrican avait amené neuf par six et trois, — ce qui lui faisait atteindre d’un bond le Wisconsin, vingt-sixième case.

« Le voilà bien reparti !… » s’était écriée la malheureuse Jovita Foley.

Et le 10, lorsque le télégraphe annonça que l’homme masqué était, par cinq points, envoyé au Minnesota, cinquante et unième case :

« Décidément… c’est celui-là qui a le plus de chances, dit-elle, et ce sera lui qui héritera des millions de cet Hypperbone ! ».

On voit que l’excentrique défunt avait singulièrement baissé dans son estime depuis que les dés avaient fait une prisonnière de sa chère Lissy Wag !

Enfin il avait été convenu que, le soir même, les deux amies prendraient le train pour Chicago. Bien que les journaux de Louisville eussent fait connaître dans quel hôtel Lissy Wag et Jovita Foley étaient descendues, inutile de dire que pas un seul reporter n’était venu leur rendre visite. Si ce fut à la grande satisfaction de l’une, ce fut à l’extrême dépit de l’autre, puisque, répétait-elle en serrant les lèvres, « c’est comme si nous n’existions pas ! »

Mais il était écrit qu’elles ne partiraient pas encore pour la métropole illinoise. Une circonstance des moins prévues allait leur permettre de peut-être retrouver une partie de leurs chances en rentrant dans le match que, faute de payer la prime, elles devaient abandonner.

Vers trois heures de l’après-midi, le facteur du quartier se présenta à l’hôtel, monta à la chambre des deux amies. Dès que la porte lui eut été ouverte :

« Mademoiselle Lissy Wag ?… demanda-t-il.

— C’est moi, répondit la jeune fille.

— J’ai une lettre chargée à votre adresse, et si vous voulez signer la réception…

— Donnez », répondit Jovita Foley, dont le cœur battait à se briser.