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mistress branican.

doute, — il avait quarante-trois ans alors, — mais moins qu’on aurait pu le croire après un si long séjour chez les indigènes, il avait toujours ses traits accentués, ce regard résolu dont le feu ne s’était point éteint, son épaisse chevelure, blanchie il est vrai. Resté solide et robuste, John, mieux que Harry Felton peut-être, eût supporté les fatigues d’une évasion à travers les déserts australiens, — fatigues auxquelles son compagnon avait succombé.

En apercevant Len Burker, le capitaine John recula tout d’abord. C’était la première fois qu’il se trouvait en face d’un blanc depuis qu’il était prisonnier des Indas. C’était la première fois qu’un étranger allait lui adresser la parole.

« Qui êtes-vous ? demanda-t-il.

— Un Américain de San-Diégo.

— De San-Diégo ?…

— Je suis Len Burker…

— Vous ! »

Le capitaine John s’élança vers Len Burker, il lui prit les mains, il l’entoura de ses bras… Quoi ?… Cet homme était Len Burker… Non !… c’était impossible… Il n’y avait là qu’une apparence… John avait mal entendu… Il était sous l’influence d’une hallucination… Len Burker… le mari de Jane…

Et, en ce moment, le capitaine John ne songeait guère à l’antipathie que Len Burker lui inspirait autrefois, à l’homme qu’il avait si justement suspecté !

« Len Burker ! répéta-t-il.

— Moi-même, John.

— Ici… dans cette région !… Ah !… vous aussi, Len… vous avez été fait prisonnier… »

Comment John aurait-il pu s’expliquer autrement la présence de Len Burker au campement des Indas ?

« Non, se hâta de répondre Len Burker, non, John, et je ne suis venu que pour vous racheter au chef de cette tribu… pour vous délivrer…