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L nOMOPIlONIE I ij I

S'il y a rime en pareil cas, ce n'est que l'eflet du hasard : seul l'ordie des mots importait aux poètes (i). On peut même dire que la rime serait plus fréquente chez eux s'ils ne l'avaient pas plutôt évitée que recherchée.

§ 187. Il semble bien, au contraire, que dans les dictons et formules de toute sorte les Italiotes aient voulu l'attacher les idées par la ressem- blance du son, afin d'en mieux marquer le lien logique ou émotionnel et de le mieux graver dans la mémoire (2).

lluat huât huât — ista pista sista Formule magique (Catox, De agricull., 160).

Terra pestem teneto, salus hic mancto. Charme contre les maii.r de pied (Varrox, De re rusi., I. 2, 27).

Xee huic inorbo caput crescat aut si creuerit tabescat.

Charme contre les grains d'orge (Marcellls Emi'iricls, éd. Ilelmreich, 1889, p. 71). Do Theuesle usquc ad Tergeste liget sibi collum de reste. Charme contre le mal de jwitrine {ih., p. \ô!\).

Dans les Tables Eiignbines (3), on trouve des formules comme persei, mersei (4).

Bien plus encore que la rime complète ou l'assonance, on recherchait l'allitération, surtout dans les premiers temps. Avant 1 âge classique ou plutôt historique, les Latins avaient un accent (d'intensité) sur la première syllabe des mots (5). Chez eux, comme chez les Celtes et les Germains, cette accentuation initiale et par suite énergique a favorisé le goût qu'ont tous les hommes pour l'allitération (cp. Première Partie, 5; C8, Rem. 2) (G).

(i) Entre autres preuves, on peut citer l'observation que fait Bède, d'après ses diverses auto- rités (De arte nu'lrica, Keil, ^II, p. 2/4'*): Optimaautem uersus dactvlici ac pulcherriraa posilio est, cum primis paenullima, ac mediis respondet exlreraa ». Ses premiers exemples ont fait croire à certains qu'il parlait de la rime : Peruia diuisi patuerunt caerula ponti ; etc. Mais le dernier montre bien qu'il s'agit uniquement de l'ordre des mots : Rubra quod appositum testa ministrat olus.

(2) Il y a parfois rime de sens aussi bien que rime de son : tortore tortus, uenena ueneno- rum, fidus fidelis, etc. Cp. /■■« Partie, p. i3o, note i.

(3) V. éd. Michel Bréal, Paris, 1875. Le dialecte de ces tables est l'ombrien.

(4) La rime est-elle voulue dans la lex horrendi carminis sur le jugement de la perduellio : Si uincent, caput obnubito, infelici arbori reste suspendit© (Tite-Live, I, a6)? Nous trouvons également la rime dans les formules légales et juridiques des Germains (v. plus bas). Les pre- mières lois étaient des préceptes religieux, la loi de Moïse par exemple.

(5) V. Vendryes, L'intensité initiale en latin.

(G) L'allitération est assez fréquente en français : sain et sauf, toi ou /ard, au loin et au large (cp. /onge /ateque), c'est 6el et bon, jeter /eu et /lamme, etc. .\os poètes l'emploient souvent : Il n'avait pas d'en/er dans le /eu de sa /orge (V. Hugo, Boo: endormi). — La ville s'endormait au pied du mont brumeux (Leconte de Lislc, Les Hurleurs'). Chez les contemporains on peut supposer une influence germanique. Il n'en est pas de même chez Corneille : Les Vaures et la mer montent jusques au port. V., entre autres, le dialogue lyrique entre Chimènc et Rodrigue (III, iv), depuis ; O //nraclc d'amour, etc., jusqu'à : Va-t-en encore un coup ; je ne t'éroutcplus. Nos prosateurs eux-mêmes recherchent parfois l'allitération, Rabelais en abuse : un gros, gras, grand, gris, joly, petit, moisy livret (I, i) ; un moine moinant do moinerie, etc. Bossuct ne la