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des esclaves ? Et dans les deux récits, le dernier mot n’est-il pas le même : « Il se voua comme offrande au noir Esprit » ? Milcho semble donc bien avoir été le prototype de Murdoc’h aux longs cheveux.

L’histoire de saint Patrice est assez légendaire pour que Leconte de Lisle soit vite excusé d’en avoir arrangé certains faits. La seule chose qu’on est en droit de lui demander c’est s’il a conservé les caractères que la légende prête à la prédication de Patrice et aux oppositions qui furent faites à son apostolat. Or, il a bien respecté la physionomie des adversaires de l’apôtre : dans les deux vieillards du début, dans le Murdoc’h de la fin, nous reconnaissons sans peine ces magiciens et ces chefs à l’intraitable orgueil dont l’obstination fait tant de peine au bon Jocelin. Mais, vers la fin de l’entretien de Murdoc’h, n’a-t-il pas altéré la physionomie traditionnelle, si douce, du saint qui convertit l’Irlande ?


LE JUGEMENT DE KOMOR[1]


Sauf son décor, le poème intitulé le Jugement de Komor n’a rien de breton, et à la légende de sainte Triphyne Leconte de Lisle n’a guère emprunté, avec les noms des deux héros, que le coup de glaive qui détache si lestement de ses épaules la tête blonde de Tiphaine.

Il avait lu cette touchante et merveilleuse histoire dans le Foyer breton d’Émile Souvestre[2].


  1. Poèmes barbares, XVIII.
  2. Paris, Coquebert, 1845.