Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/227

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le roi de Vannes avait une fille qui passait pour la plus belle créature du monde. Elle s’appelait Triphyna. Le roi eût mieux aimé perdre ses chevaux, ses châteaux et toutes ses fermes que de voir Triphyna mécontente de vivre.

Comorre, qui régnait sur le pays du blé noir, vint un jour, déguisé en soldat, à la foire de Vannes. Il vit Triphyna, l’aima et l’envoya demander en mariage par des ambassadeurs, qui offrirent au roi du miel, du fil et une douzaine de pourceaux.

Il passait pour être le plus méchant homme que Dieu eût créé depuis Caïn. Quand il était jeune, sa mère, dès qu’il sortait du château, tirait la corde du beffroi pour avertir les gens de se cacher. Plus tard, il essaya un jour son fusil sur un-enfant qui conduisait un poulain. Il avait eu quatre femmes : elles étaient mortes subitement, sans recevoir les sacrements ; on le soupçonnait fortement de les avoir tuées.

Le roi de Vannes, comme bien on pense, refusa sa fille.

Les ambassadeurs lui déclarèrent la guerre, et le comte de Cornouaille arriva bientôt avec une puissante armée.

Alors saint Veltas (Gildas) alla trouver Triphyna et lui demanda d’épouser Comorre pour empêcher la mort de tant de chrétiens. Il lui remit une bague d’argent, qui devait, en signe d’avertissement, devenir noire dès qu’elle courrait un danger.

Le mariage se fit. Comorre aima sa femme et devint doux. Ses gens disaient : — Qu’a donc le Seigneur, que les pleurs ni le sang ne lui plaisent plus ?

Un jour, il partit pour une grande assemblée de princes