Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/326

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dans ses Érinnyes qu’il n’a voulu faire de l’Euripide dans son Apollonide. Bien qu’il ait suivi son modèle de beaucoup plus près que Racine n’a jamais suivi les siens, cependant son dessein n’était point de copier les procédés de l’art eschyléen. Encore moins était-il de mettre dans son poème la psychologie ou la morale qu’Eschyle avait mises dans le sien. S’il a raconté après l’auteur de l’Orestie le meurtre d’Agamemnon par sa femme Clytemnestre, puis le meurtre de Clytemnestre par son fils Oreste, il a prétendu le faire à sa manière. Disons-le tout de suite : en s’appuyant sur Eschyle comme sur le poète chez qui il trouvait la version la plus ancienne de la légende d’Agamemnon, il semble avoir eu l’intention de reconstituer une Grèce très primitive, la Grèce de la civilisation mycénienne.

Il tente d’en reconstituer d’abord le décor, aidé d’Eschyle et d’Homère, aidé aussi des lumières que les découvertes de l’archéologie mettaient à sa disposition. Son style éminemment plastique nous montre les combats et les voyages des Achéens, les lances rompant l’orbe des boucliers et les nefs enfonçant dans le sable leurs éperons d’airain. Ici nous sont décrits les rites des sacrifices, et là les rites des funérailles. Tel vers nous fait entendre le son des knémides au travers de la plaine, et tel autre le bruit strident des chars sur les pavés cyclopéens.

Mais les âmes intéressent le poète plus que les décors. Et quelle idée s’en fait-il ? Pour lui,


Les hommes chevelus de l’héroïque Hellas,


étant des primitifs, ont été de vrais barbares. Sa Clytem-