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ARCÉSILAS.

d’abord avec Autolycus[1], dans son pays, puis à Athènes, avec Hipponicus[2]. Il avait lu Platon[3], et professa toujours pour lui la plus vive admiration. La supériorité d’Arcésilas était tellement reconnue, même par ses condisciples, qu’après la mort de Cratès, Socratides[4] s’effaça devant lui, et lui laissa la direction de l’école ; il mourut, âgé de 75 ans, vers 340 av. J.-C.

Sa vie ne fut marquée d’aucun événement important. Il resta systématiquement à l’écart des affaires publiques, et tandis que la plupart de ses contemporains illustres couraient au-devant d’Antigone avec un servile empressement, il se tint toujours sur la réserve. Aussi, envoyé plus tard en ambassade auprès d’Antigone par ses concitoyens, il échoua.

S’il fallait croire tous les commérages de Diogène, Arcésilas aurait été un personnage fort peu estimable. Il n’est presque question, dans le chapitre que le compilateur lui a consacré, que d’orgies et de débauches ; on l’appelle un nouvel Aristippe ; nous voyons le successeur de Platon vivre publiquement avec deux courtisanes, et ce sont ses amours les moins coupables ; il n’est pas jusqu’à son amitié avec le sage Crantor qui n’ait donné lieu à de méchants propos. Il mourut, nous dit-on, pour avoir trop bu, et il aurait rendu le dernier soupir en divaguant, et dans un hoquet. Ce sont au moins des exagérations et probablement des calomnies. Ses succès, comme ses doctrines, lui avaient fait beaucoup d’ennemis ; on l’a vu par ce que Timon dit de lui, et Plutarque[5] nous assure qu’Épicure était fort jaloux de sa gloire. Vraisemblablement, l’ennemi acharné de Zénon n’avait rien de l’austérité stoïcienne ; il se peut qu’il ait pris plaisir à se mettre, de toutes les manières, en opposition avec son rival, et qu’il ait eu pour le luxe et l’élégance plus de goût qu’on n’en attend d’ordinaire d’un philosophe ; sa grande

  1. Diog., 29.
  2. Ibid., 32.
  3. Ibid.
  4. Ibid.
  5. Adv. Colot., 26