Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/81

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j’ai gagné dix parties… À quatre couronnes que vous avez engagées, c’est dix louis… les voilà ! Je lui fis observer qu’il était dans l’erreur, que je ne m’étais pas intéressé à son jeu ; il ne répondit qu’en me mettant les dix louis dans la main, après quoi il me tourna le dos. Prenez, me dit le jeune homme qui m’avait initié aux mystères du tripot, et qui se trouvait à côté de moi, prenez, et suivez-moi. Je fis machinalement ce qu’il me disait, et lorsque nous fûmes dans la rue, mon Mentor ajouta : « On s’est aperçu que vous suiviez les parties, on craint qu’il ne vous prenne fantaisie de découvrir le pot aux roses, et comme il n’y a pas moyen de vous intimider, parce qu’on sait que vous avez le bras bon et la main mauvaise, on s’est décidé à vous donner part au gâteau : ainsi, soyez tranquille sur votre existence, les deux cafés peuvent vous suffire, puisque vous en pouvez tirer, comme moi, de quatre à six couronnes par jour. » Malgré toute la complaisance qu’y mettait ma conscience, je voulus répliquer et faire des observations : « Vous êtes un enfant, me dit mon honorable ami, il ne s’agit pas ici de vol… on corrige tout bonnement la fortune… et croyez que les choses se passent