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CHAPITRE VI.

n’avait point encore coulé ; mais l’horizon devenait chaque jour plus menaçant, et il était évident qu’une crise violente allait éclater en Espagne. Les amis, la famille[1] de Geoffroy Saint-Hilaire, justement alarmés, avaient voulu le retenir ; mais à tous les conseils, à toutes les supplications, il avait répondu : « J’ai accepté cette mission dans un moment où elle était enviée de tous ; je ne la déserterai pas, quand personne n’en voudrait plus. »

Quelques jours après, combien il s’applaudissait de sa détermination ! Tout danger semblait s’être évanoui, et chaque pas que Geoffroy Saint-Hilaire faisait sur le territoire espagnol, ajoutait à sa sécurité. Sur la frontière même, il apprenait l’abdication de Charles IV, le couronnement du prince des Asturies, l’occupation de Madrid par les Français, le rétablissement de l’ordre, et il croyait pouvoir écrire à sa famille : « L’horizon politique s’est éclairci en Espagne : quelque chose qui arrive, je ne puis que faire un voyage agréable et sûr. »

  1. Son père et sa mère n’existaient plus depuis plusieurs années, et son bien-aimé frère, Marc-Antoine Geoffroy, avait lui-même succombé, à peine âgé de trente et un ans, à la suite de la bataille d’Austerlitz. Mais d’autres liens avaient remplacé ceux que la mort avait brisés. Il s’était marié en décembre 1804. Une heureuse alliance l’avait rendu gendre de M. Brière de Mondétour, receveur général des économats sous Louis XVI, et l’un des hommes les plus estimés de cet infortuné prince.