Page:Vignon - Un drame en province - La Statue d Apollon.djvu/12

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potelée pour ramener les pièces d’argent qui s’étaient mêlées entre les fiches et les jetons.

— Je vous conseille de vous plaindre de la longueur de la partie, mon cher curé ; vous nous avez dévalisés, comme toujours ! s’écria en souriant le marquis.

— Ah ! monsieur le marquis, ne me reprochez pas mes gains… J’ai grand besoin que la Providence prenne le masque du hasard, pour me favoriser !

Et le curé commenta sa phrase avec un soupir.

Le marquis releva la tête, qu’il tenait baissée tout à l’heure, pour suivre les péripéties du jeu. — Belle tête aux lignes nobles, à l’expression en même temps énergique et douce, sévère et naïve, tant ce regard limpide semblait plein de confiance comme de loyauté ! De profil, on remarquait que le nez du marquis, fort et très-busqué, son front un peu fuyant et rétréci aux tempes, lui donnaient une vague ressemblance avec les têtes d’oiseaux. Mais l’ensemble de sa personne avait surtout de la grandeur, ce je ne sais quoi qu’on appelle « l’air gentilhomme. »

Il se leva et vint s’accouder à la cheminée, le dos au jeu. Le curé le rejoignit avec une lenteur embarrassée. Il semblait chercher la formule d’une idée ou