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Qu’avec le secours de son excellente grammaire et de ses lumineuses explications sur le génie de cette langne, à la fois savante et simple, on parvienne à lire ces curieux monuments, on y trouvera des trésors de verve et de vivacité ingénieuse ; on admirera la hardiesse de ces chants si libres, qui répandaient la gatté, la satire, l’insulte, et faisaient dominer l’esprit dans un temps où la force matérielle était si puissante elle-même empruntait ce secours et les plus belliqueux seigneurs étaient souvent poëtes.

Un autre point de vue se rattache à ces poésies. Le xie siècle avait vu s’accomplir une grande révolution dans tout le système de l’Europe. Cette révolution ne doit pas être séparée, dans notre souvenir, du premier élan poétique des peuples du Midi ; car, remarquez-le bien, ce n’est qu’à la suite de grands événements, et sous les auspices de quelque génie supérieur, que se dénoue, que grandit l’esprit de toute une nation. À la fin du xie siècle, tout était changé dans la langue des peuples de l’Europe latine. La date précise du changement, je ne la connais pas. Il en est de ces révolutions dans l’esprit et l’idiome des peuples, comme de cette révolution que chacun de nous éprouve en soi-même ; on ne s’aperçoit pas de ce que chaque jour nous em-