Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/63

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ble, dont Muratori a fait justice. Toutefois voulez-vous savoir sur quelles apparences on a pu l’étayer ? Parmi ces révolutions de la société et des mœurs, ces transmutations d’une langue dans une autre, les éléments qui prédominent ne sont pas toujours ceux que l’on connaissait le mieux. Sans doute en Italie, à côté de la langue citadine, à côté de l’urbanité romaine, dont parle Cicéron, il existait une langue latine un peu moins correcte, où se retrouvaient des locutions villageoises, locales, et quelques restes de la langue des nations vaincues. Plusieurs mots de cet idiome provincial sont plus voisins de l’italien qu’ils ne le sont du latin lui-même. Là, vous trouverez, au lieu de mutare, le verbe cambiare, qui se conserve dans l’italien moderne. Là, minare signifie mener ; battuere signifie battre. Plaute et Apulée se sont servis de ces mots ou surannés ou provinciaux, que nos langues ont adoptés. Saint Augustin remarque aussi que, dans la langue militaire et populaire, on prenait le mot parentes dans le même sens que celui de cognati et d’affines. Ces vieux mots, ces locutions populaires avaient dormi pendant l’éclat et la gloire de la langue latine : conservés dans quelque coin, ou ressuscités par l’usage, ils passèrent aux races nouvelles. Mais il y a loin