Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/72

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Ainsi, parmi les descendants mêmes de la race punique, le latin était universellement répandu, et compris à la fois par ceux qui avaient oublié leur propre langue, et par ceux qui la savaient encore. Les prédications et les prières de l’Église en étendaient sans cesse l’usage. Mais ce latin d’Afrique n’était-il pas altéré ? Saint Augustin le dit. Ce studieux amateur de Cicéron et de Virgile se vante même d’avoir souvent employé des locutions barbares et populaires, pour se faire mieux goûter des mariniers d’Hippone.

Ailleurs, il se plaint que les chants du peuple gâtaient la langue latine. « Je ne puis obtenir, dit-il, qu’ils ne disent pas super ipsum floriet sanctificatio mea. » On peut croire que ces chants populaires introduisaient bien d’autres altérations dans l’ancienne langue. Il y avait des rhéteurs païens qui attaquaient le christianisme à cause de cela. Mais la grammaire était un bien petit événement dans le monde, à côté de cette prodigieuse et bienfaisante révolution. Arnobe répondait à ces rhéteurs avec un grand dédain pour leurs scrupules ; et il avoue qu’en effet le christianisme doit changer la langue, comme tout le reste. Ainsi, Messieurs, immense extension de la langue latine ; altération de cette