Aller au contenu

Page:Villetard de Laguérie - Contes d'Extrême-Orient, 1903.pdf/99

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sous la protection des Japonais, d’un fils que le roi avait eu d’une dame de la cour, Mme Chang, et le danger d’une rivalité préparée d’avance par ces ennemis, vigilants et sans scrupules, entre lui et le prince royal.

Leur intervention l’avait empêchée d’y pourvoir en supprimant la mère et l’enfant. L’autre rival de son Benjamin, mais celui-là, du moins, ne la gênerait plus, Li-Shoun yoo, le petit-fils adoré du Tai Ouen-Koun, hantait souvent sa pensée, comme l’ombre sanglante du duc de Guise l’agonie de la vieille Florentine, à qui rien non plus n’avait coûté pour mettre Henri III sur le trône. La princesse Min savait aussi, sans avoir été l’élève de Machiavel, que le sang est une semence, et que, versé par un assassinat, même juridique, comme celui de Li-Shoun yoo, tôt ou tard il produit la vengeance.

Entourée de ses parents, placés par elle auprès du roi, en attendant qu’elle en formât un conseil privé (Choseï In), qui eût réduit à de vaines parades les vrais ministres ; renseignée sur tout par les créatures dont elle peuplait les administrations et la cour, malgré les réclamations infatigables des Japonais ; protégée par la garde que commandait le colonel Hyeun, son sauveur en 1884, elle bravait néanmoins la meute des conseillers nippons et des nobles coréens leurs clients, découplés par le comte Inouye et le vicomte Mioura Goro dans tous les ministères.

Leur quête infatigable la maintenait sur le qui-vive ; c’est pourquoi son œil exercé, comme celui des loups de mer, par la nécessité de prévenir les « coups de tabac », sondait le beau ciel bleu si pur des automnes de la mer Jaune, et à travers la mélancolique sérénité de la 8e lune de Yeul mi, voyait les nuages, d’où part la foudre, présents par leurs innombrables molécules, que la moindre baisse de la pression atmosphérique rassemblerait immédiatement.

Cette baisse survint le 7 octobre, soudainement. La garde