Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/66

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longue, ayant perfectionné les lentilles énormes et les gigantesques réflecteurs des ingénieurs américains, notamment des appareils de Philadelphie et de Québec (tombés, faute d’un génie tenace, dans le domaine du Cant et du Puff), M. Grave, disons-nous, se propose (nanti de brevets préalables) d’offrir, incessamment, à nos grandes industries manufacturières et même aux petits négociants, le secours d’une Publicité absolue.

Toute concurrence serait impossible devant le système du grand vulgarisateur. Qu’on se figure, en effet, quelques-uns de nos grands centres de commerce, aux populations houleuses, Lyon, Bordeaux, etc., à l’heure où tombe le soir. On voit d’ici ce mouvement, cette vie, cette animation extraordinaire que les intérêts financiers sont seuls capables de donner, aujourd’hui, à des villes sérieuses. Tout à coup, de puissants jets de magnésium ou de lumière électrique, grossis cent mille fois, partent du sommet de quelque colline fleurie, enchantement des jeunes ménages, — d’une colline analogue, par exemple, à notre cher Montmartre ; — ces jets lumineux, maintenus par d’immenses réflecteurs versicolores, envoient, brusquement, au fond du ciel, entre Sirius et Aldébaran, l’Œil du taureau, sinon même au milieu des Eyades, l’image gracieuse de ce jeune adolescent qui tient une écharpe sur laquelle nous lisons tous les jours, avec un nouveau plaisir, ces belles paroles : On restitue l’or de toute emplette qui a cessé de ravir ! Peut-on bien s’imaginer les expressions diffé-