Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/104

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une candide pensée, — l’oppressa : revoir, encore une fois, une seule fois, pour un suprême adieu, la Madone de jadis.

Donc, vêtue en pénitente et mendiant un peu de pain sur la route, elle s’achemina vers le monastère, — vers la chapelle, plutôt ! car elle ne pouvait plus rentrer parmi les vierges fidèles. En quelques jours de marche, et comme se fonçaient les bleuissements d’un beau soir d’été tout brillant d’astres, elle arriva tremblante, exténuée, devant le saint portail.

Elle se souvenait qu’à cette heure-là ses anciennes compagnes étaient retirées, en oraison, dans leurs cellules, et que, sous les hauts piliers, l’église devait être aussi déserte que le soir de l’enlèvement. Elle poussa donc la porte et regarda : — personne !… Là-bas, seulement, sous la lampe toujours claire, la Madone.

Elle entra, puis, à deux genoux, avança sur les dalles blanches, vers sa céleste amie,