Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/173

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il m’indiqua l’un des bancs ; je m’assis, et, m’ayant imité, il m’offrit un havane, en me disant :

— Vous êtes le seul qui soyez venu me visiter. En quoi puis-je vous être utile ?

Devant pareil accueil, et fort de mon extrême jeunesse, je lui signifiai, sans ambages ni détours, à cœur ouvert, ma soif de conquérir une aisance dorée. Je lui avouai la foi que la lucidité de ses vues en affaires me suggérait toujours, et le grand espoir que, malgré sa mésaventure, j’avais fondé sur sa direction. Jusqu’à ce jour, mes goûts intellectuels m’avaient entraîné vers le culte des Lettres : écrire un beau livre me semblait encore un moyen de me créer une influence sociale et de parvenir, par suite, à la dignité du pain viager, la seule sérieuse en ce siècle.. M’étais-je fourvoyé ? Devais-je continuer ? et dans quelle ligne ?

— Cela dépend, répondit-il. — Si votre cerveau ne sécrète que du Beau convenu, si