Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/200

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idées généreuses ; mais, cette belle cause il ne l’entrevoyait guère au milieu du farouche conflit d’intérêts qui, de nos jours, étouffe d’avance, sous le ridicule et le dédain, tout effort tenté vers quoi ce soit d’élevé, de désintéressé, de digne d’être. — S’isolant donc en soi-même, avec une grande mélancolie, c’était comme s’il se fût fait naturaliser d’un autre monde.

Bénédict reçut un accueil amical chez les Rousseau-Latouche ; on s’ennuyait, parfois ; ce jeune homme représentait, au moins pour Évariste, quelques heures plus agréables, une distraction. Puis, il était de la famille. M. d’Allepraine dut céder à l’invitation formelle de passer les vacances avec eux.

En quelques jours, Frédérique et Bénédict, s’étant reconnus du même pays, se mirent, naturellement, à s’aimer d’un amour idéal, aussi chaste que profond, et que sa candeur même légitimait presque absolument. Certes ils n’étaient pas sans tristesse ;