Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/284

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sont vos éléphants du Zoological Garden ?

— Un seul est du sexe féminin, répondit celui-ci.

— Fort bien ! s’écria Mayëris triomphant : croisons-le ! J’attendrai les vingt mois réglementaires de la gestation : le rejeton mulâtre, devant les tribunaux, fera preuve de la race blanche de celui-ci.

— Ce serait une idée, en effet, murmura le directeur — et, ajouta-t-il d’un ton narquois, vous obtiendrez, sans doute, ainsi, un éléphant café au lait… s’il n’était notoire que l’éléphant captif se refuse rigoureusement à toutes les joies de la paternité.

— Fables ! comme leur prétendue pudeur, tout cela ! monsieur ! répondit le dompteur : on a, là-bas, mille exemples du contraire. D’ailleurs les us d’un éléphant blanc sont autres. Pour le surplus, je saupoudrerai, dût-il en périr, sa nourriture des aphrodisiaques les plus violents — et que le sort en décide !

Le soir même, le dompteur, tout ravi, se frottait les mains, ayant acquis la certitude de ses nouvelles espérances.

Par contre, à l’aurore suivante, la démesurée bête fut trouvée inanimée par les gardiens dans la maison des éléphants. La dose de Chin-sing avait été trop forte : il était mort d’amour.

— Soit ! gronda Mayëris à cette nouvelle ; mais, maintenant, je puis attendre en sécurité toutes mesures abortives seraient une déloyauté dont je sais mes adversaires