Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/385

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possible — que ces enfants condamnés mourussent d’une joie si vive, si pénétrante, si encore inéprouvée, que cette mort leur semblât plus désirable que la vie ? Oui, par l’une de ces magies qui nous dissipent comme des ombres, si tu pouvais augmenter leur amour même, — l’exalter, par quelque vertu de Sivâ ! — d’un embrasement de désirs… peut-être le feu de leurs premiers transports suffirait-il pour consumer les liens de leurs sens en un évanouissement sans réveil ! — Ah ! si cette mort céleste était réalisable, ne serait-elle pas une conciliatrice, puisqu’ils se le donneraient à eux-mêmes ? Seule, elle me semblait digne de leur douceur et de leur beauté.

« Ce fut à ces paroles que cette bouche de nuit, engageant ta promesse divine, me répondit avec tranquillité :

— « Reine, j’accomplirai ton désir. »

« Sur cette assurance de ton prêtre, accès libre lui fut laissé, par mes ordres, des palais de mes captifs. — Consolée, d’avance, par la beauté de mon crime, je me départis en armes, l’aube suivante, vers l’Arachosie, — d’où je reviens, victorieuse encore, Sivâ ! grâce à ton ombre et à mes guerriers, ce soir.

« Or, tout à l’heure, au franchir des citadelles, j’eus souci de la fatale merveille, sans doute accomplie durant mon éloignement. Déjà songeuse d’offrandes sacrées, je contemplais les dehors de ce temple, lorsque mes phaodjs, apparus, m’ont révélé quelle