Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne devait pas orner son triomphe de cette vivante ! Toute lasse d’avoir lascivement étudié dans les salles souterraines de ses palais ce que ses esclaves pouvaient supporter de tourments sans mourir, elle réfléchissait. À ses pieds, jouait l’une de ces filles naïves élevées pour la servir d’une certaine façon et dont elle s’accommodait. Les vertiges des éblouissantes et profondes nuits entouraient cette reine, fille des terreurs, du silence et de la volupté ! Elle se perdait, inéblouie de sa propre majesté, dans quelque rêve que nul ne sondera jamais… C’était sublime.

Tullia Fabriana courba la tête, et après une seconde :

— Ô passé !… dit-elle comme un murmure.

Ces paroles avaient rendu la chambre fantastique.

— Vous êtes fidèles et vous gardez les secrets malgré les années sans nombre, statues aux bouches de pierre !… Mais lorsque vous souteniez les travées où les restes de ces rois des vieux mondes reposaient embaumés près du Nil, sans doute l’avez-vous vue passer ainsi, la grande reine !