Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/90

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Ces exercices avaient affermi ses formes souples, et préservèrent sa santé de l’accablement du travail. Comme les vierges antiques de Thèbes et de Sparte, elle avait la modestie, la beauté et la force. La Science l’avait baisée au front comme une immortelle.

Un charme de grandeur aimable courait dans ses moindres paroles. Jamais elle ne disait que des choses simples, et les gens devenaient comme naïfs devant sa sympathique naïveté.

Seulement, lorsqu’elle franchissait le portail de l’immense appartement que nous allons décrire, — où, depuis plus de six années, elle s’enfermait huit et dix heures chaque jour, sans parler des nuits, — l’aménité ingénue de son visage tombait comme un masque : la mystérieuse et sombre splendeur de sa vraie physionomie apparaissait.

Elle entrait, poussait les doubles verrous, venait lentement s’accouder sur une grande table noire chargée de livres, de manuscrits anciens, de cartes et d’instruments scientifiques et demeurait immobile.