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choisi est celui du sud-est, car c’est sur ce côté du Louvre que l’on peut réunir le plus de documents antérieurs aux reconstructions des XVIe et XVIIe siècles. Notre vue montre la quantité de défenses qui protégeaient les abords du château, et le soin apporté par Charles V dans les reconstructions ; elle fait comprendre comment les tours de Philippe-Auguste avaient dû être engagées par la surélévation des courtines servant de façades extérieures aux bâtiments neufs. Vers le nord, on aperçoit l’escalier de Raimond du Temple et les riches bâtiments auxquels il donnait accès. Du côté de l’est, sur le devant de notre dessin, passe l’enceinte de la ville bâtie par Philippe-Auguste, terminée sur la Seine par une haute tour qui subsista jusqu’au commencement du XVIIe siècle ; derrière cette tour sont les deux portes, l’une donnant entrée dans la ville le long de la première enceinte du Louvre, l’autre entrant dans cette enceinte. Ce front de l’enceinte de Paris, bâti par Philippe-Auguste, se défendait nécessairement du dehors au dedans depuis la Seine jusqu’à la barrière des Sergents ; c’est-à-dire que le fossé de ses courtines et tours était creusé du côté de la ville et non du côté du Louvre. Cette portion d’enceinte dépendait ainsi du château et le protégeait contre les entreprises des habitants.

Du temps de Charles V, le château du Louvre et ses dépendances contenaient tout ce qui est nécessaire à la vie d’un prince. Il y avait, dit Sauval, « la maison du four, la panneterie, la sausserie, l’épicerie, la pâtisserie, le garde-manger, la fruiterie, l’échançonnerie, la bouteillerie, le lieu où l’on fait l’hypocras… On y trouvait la fourerie, la lingerie, la pelleterie, la lavanderie, la taillerie, le buchier, le charbonnier ; de plus la conciergerie, la maréchaussée, la fauconnerie, l’artillerie, outre quantité de celliers et de poulaillers ou galliniers, et autres appartements de cette qualité. » Les bâtiments de l’artillerie, situés au sud-ouest, avaient une grande importance. Ils sont indiqués dans notre plan (fig. 20), en P Q T. « Dans le compte des baillis de France rendu en la Chambre en 1295, dit Sauval, il est souvent parlé des cuirs, des nerfs de bœuf, et des arbalètes gardées dans l’artillerie du Louvre… Lorsque les Parisiens s’emparèrent du Louvre en 1358, ils y trouvèrent engins, canons, arbalètes à tour, garrots et autre artillerie en grande quantité… » Le maître de l’artillerie y était logé, y possédait un jardin et des étuves ; en 1391, quoique l’artillerie à feu fût déjà connue, elle n’était guère employée à la défense des places fortes. Il y avait encore, ajoute Sauval, à cette époque, « une chambre pour les empenneresses, qui empennoient les sagettes et viretons ; de plus un atelier où l’on ébauchoit tant les viretons que les flèches, avec une armoire à trois pans (trois côtés), longue de cinq toises, haute de sept pieds, large de deux et demi, où étoient enfermés les cottes de mailles, platers, les bacinets, les haches, les épées, les fers de lance et d’archegayes et quantité d’autres sortes d’armures nécessaires pour la garnison du Louvre. » Ainsi, au XIVe siècle, un château devait contenir non-seulement ce qui était nécessaire à la vie journalière, mais de nombreux ateliers propres à la confection et à