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UNE FEMME M’APPARUT…

Mais je sondai bientôt l’abîme de ma folie…

« Comme l’Art, » répondait-elle, « l’amour est complexe, et il faut, pour le posséder enfin, suivre longuement une route malaisée.

« L’artiste qui rêve une statue ne cherche point en un modèle unique sa vision divine. Il trouve la splendeur absolue à travers des êtres dissemblables, dont chacun lui a révélé ce qu’il avait de plus beau. Et moi, pour mon rêve passionné, il me faut réunir les perfections éparses, afin de les confondre en un harmonieux ensemble créé par mes songes. Ce que j’aime en toi, c’est ta puissance d’amour, un peu sauvage, un peu primitive, mais absolue.

— Tu as effroyablement raison, Vally. Tu es l’Avril. Ces vers de Swinburne peuvent seuls t’exprimer et te contenir tout entière :

A mind of many colours, and a mouth
Of many tunes and kisses.

« Et moi, je t’aime douloureusement, comme tous les êtres simples.

— Tu m’aimes mal, » interrompait ma Fleur