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UNE FEMME M’APPARUT…

de déclin et de vieillesse. J’ai eu un moment d’hésitation avant de vous reconnaître. Je suis très bonne, au fond, malgré mes joies légères d’enfant gâtée. J’écouterai le récit de vos peines, fût-il interminable. C’est le meilleur moyen de guérison. À force de parler d’une chose, on finit par s’en détacher, car on se lasse même de ses plus chères douleurs.

— Peut-être avez-vous raison, petite églantine d’avril. Mais vous m’effrayez un peu : vous ressemblez trop au matin.

— Le matin est parfois très doux, lorsqu’il se lève après une nuit de fièvre, » dit-elle. « Il ne faut pas redouter le matin. Je l’ai vu errer dans les bocages, pour voir si les roses rouges s’étaient ouvertes pendant la nuit. Et, d’un geste délicat infiniment, il apaisait la longue insomnie des fleurs de tabac, qui s’endormaient enfin une à une.

— Le sommeil… » murmurai-je. « Il y a si longtemps que je n’ai dormi d’un véritable sommeil. J’ai appris à aimer les insomnies qui m’apportent les pensées nocturnes, si diffé-