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CHAPITRE CLXXXIII.

leurs jours. Les anciens Romains n’avaient d’abord connu que dix mois lunaires et une année de trois cent quatre jours ; ensuite leur année fut de trois cent cinquante-cinq. Tous les remèdes à cette fausse computation furent autant d’erreurs. Les pontifes, depuis Numa Pompilius, furent les astronomes de la nation, ainsi qu’ils l’avaient été chez les Babyloniens, chez les Égyptiens, chez les Perses, chez presque tous les peuples de l’Asie. La science des temps les rendait plus vénérables au peuple, rien ne conciliant plus l’autorité que la connaissance des choses utiles inconnues au vulgaire.

Comme chez les Romains le suprême pontificat était toujours entre les mains d’un sénateur, Jules César, en qualité de pontife, réforma le calendrier autant qu’il le put ; il se servit de Sosigènes, mathématicien, Grec d’Alexandrie. Alexandre avait transporté dans cette ville les siences et le commerce ; c’était la plus célèbre école de mathématiques, et c’était là que les Égyptiens, et même les Hébreux, avaient enfin puisé quelques connaissances réelles. Les Égyptiens avaient su auparavant élever des masses énormes de pierre ; mais les Grecs leur enseignèrent tous les beaux-arts, ou plutôt les exercèrent chez eux sans pouvoir former d’élèves égyptiens. En effet on ne compte, chez ce peuple d’esclaves efféminés, aucun homme distingué dans les arts de la Grèce.

Les pontifes chrétiens réglèrent l’année, ainsi que les pontifes de l’ancienne Rome, parce que c’était à eux d’indiquer les célébrations des fêtes. Le premier concile de Nicée, en 325, voyant le dérangement que le temps apportait au calendrier de César, consulta, comme lui, les Grecs d’Alexandrie : ces Grecs répondirent que l’équinoxe du printemps arrivait alors le 21 mars ; et les pères réglèrent le temps de la fête de Pâques suivant ce principe.

Deux légers mécomptes dans le calcul de Jules César, et dans celui des astronomes consultés par le concile, augmentèrent dans la suite des siècles. Le premier de ces mécomptes vient du fameux nombre d’or de l’Athénien Méton ; il donne dix-neuf années à la révolution par laquelle la lune revient au même point du ciel : il ne s’en manque qu’une heure et demie ; méprise insensible dans un siècle, et considérable après plusieurs siècles. Il en était de même de la révolution apparente du soleil, et des points qui fixent les équinoxes et les solstices. L’équinoxe du printemps, au siècle du concile de Nicée, arrivait le 21 mars ; mais au temps du concile de Trente, l’équinoxe avait avancé de dix jours, et tombait à l’onze de ce mois. La cause de cette précession des équinoxes, inconnue à toute l’antiquité, n’a été découverte que de