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ANNALES DE L’EMPIRE.

avons vu un exemple en Angleterre dans les factions des whigs et des torys[1].

Le pape Clément V fuyait Rome, où il n’avait aucun pouvoir ; il établissait sa cour à Lyon avec sa maîtresse la comtesse de Périgord, et amassait ce qu’il pouvait de trésors.

Rome était dans l’anarchie d’un gouvernement populaire. Les Colonna, les Orsini, les barons romains, partageaient la ville, et c’est la cause de ce long séjour des papes au bord du Rhône ; de sorte que Rome paraissait également perdue pour les papes et pour les empereurs.

La Sicile était restée à la maison d’Aragon. Charobert, roi de Hongrie, disputait le royaume de Naples à Robert, son oncle, fils de Charles II de la maison d’Anjou.

La maison d’Este s’était établie à Ferrare. Les Vénitiens voulaient s’emparer de ce pays.

L’ancienne ligue des villes d’Italie était bien loin de subsister : elle n’avait été faite que contre les empereurs ; mais depuis qu’ils ne venaient plus en Italie, ces villes ne pensaient qu’à s’agrandir aux dépens les unes des autres.

Les Florentins et les Génois faisaient la guerre à la république de Pise. Chaque ville, d’ailleurs, était partagée en factions : Florence, entre les noirs et les blancs ; Milan, entre les Visconti et les Turriani.

C’est au milieu de ces troubles que Henri VII paraît enfin en Italie. Il se fait couronner roi de Lombardie à Milan. Les guelfes cachent cette ancienne couronne de fer des rois lombards[2], comme si c’était à un petit cercle de fer que fût attaché le droit de régner. L’empereur fait faire une nouvelle couronne.

Les Turriani, le propre chancelier de l’empereur, conspirent contre sa vie dans Milan. Il condamne son chancelier au feu. La plupart des villes de Lombardie, Crême, Crémone, Lodi, Brescia, lui refusent obéissance. Il les soumet par force, et il y a beaucoup de sang de répandu.

Il marche à Rome. Robert, roi de Naples, de concert avec le pape, lui ferme les portes, en faisant marcher vers Rome Jean, prince de Morée, son frère, avec des gendarmes et de l’infanterie.

Plusieurs villes, comme Florence, Bologne, Lucques, se joignent secrètement à Robert. Cependant le pape écrit de Lyon à

  1. Voyez tome XIII, page 50 ; et le chapitre xxii du Siècle de Louis XIV.
  2. Voyez années 774, 961 et 1184.