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FRÉDÉRIC D’AUTRICHE.

Dans le même temps le duc Charles de Bourgogne achète environ pour le même prix le duché de Gueldre et le comté de Zutphen.

Ce duc de Bourgogne était le plus puissant de tous les princes qui n’étaient pas rois, et peu de rois étaient aussi puissants que lui ; il se trouvait à la fois vassal de l’empereur et du roi de France, mais très-redoutable à l’un et à l’autre.

1473-1474. Ce duc de Bourgogne, aussi entreprenant que l’empereur l’était peu, inquiète tous ses voisins, et presque tous à la fois. On ne pouvait mieux mériter le nom de Téméraire.

Il veut envahir le Palatinat[1]. Il attaque la Lorraine et les Suisses. C’est alors que les rois de France traitent avec les Suisses pour la première fois. Il n’y avait encore que huit cantons d’unis : Schvitz, Uri, Undervald, Lucerne, Zurich, Claris, Zug, et Berne.

Louis XI leur donne vingt mille francs par an, et quatre florins et demi par soldat tous les mois.

1475. C’est toujours la destinée des Turcs que les chrétiens se déchirent entre eux, comme pour faciliter les conquêtes de l’empire ottoman. Mahomet, maître de l’Épire, du Péloponèse, du Négrepont, fait tout trembler. Louis XI ne songe qu’à saper la grandeur du duc de Bourgogne dont il est jaloux ; les provinces d’Italie, qu’à se maintenir les unes contre les autres ; Mathias Huniade, qu’à disputer la Bohême au roi de Pologne, et Frédéric III, qu’à amasser quelque argent dont il puisse un jour faire usage pour mieux établir sa puissance.

Mathias Huniade, après une bataille gagnée, se contente de la Silésie et de la Moravie ; il laisse la Bohême et la Lusace au roi de Pologne.

Charles le Téméraire envahit la Lorraine ; il se trouve, par cette usurpation, maître d’un des plus beaux États de l’Europe, des portes de Lyon jusqu’à la mer de Hollande.

1476. Sa puissance ne le satisfait pas ; il veut renouveler l’ancien royaume de Bourgogne, et y enclaver les Suisses. Ces peuples se défendent contre lui aussi bien qu’ils ont fait contre les Autrichiens ; ils le défont d’abord à la bataille de Grandson, et ensuite entièrement à celle de Morat[2]. Leurs piques et leurs espadons

  1. Voltaire oublie de mentionner l’entrevue de Charles et de l’empereur à Trêves. Charles voulait se faire nommer roi par Frédéric III. (G. A.)
  2. Les Français détruisirent, en 1798, la chapelle où avaient été entassés les ossements des Bourguignons tués à la journée du 22 juin 1476. Cet ossuaire a été remplacé par une pyramide. La bataille de Grandson avait été livrée peu de temps avant celle de Morat, le 3 mars. (Cl.)