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CHARLES-QUINT.

connétable de Bourbon, qui, plus rempli d’ambition et de vengeance que d’amour pour la patrie, s’engage à attaquer le milieu de la France, tandis que ses ennemis pénétreront par ses frontières[1]. On lui promet Éléonore, sœur de Charles-Quint, veuve du roi de Portugal, et, ce qui est plus essentiel, la Provence avec d’autres terres qu’on érigera en royaume.

Pour porter le dernier coup à la France, l’empereur se ligue encore avec les Vénitiens, le pape Adrien et les Florentins. Le duc François Sforce reste possesseur du Milanais, dont François Ier est dépouillé ; mais l’empereur ne reconnaît point encore Sforce pour duc de Milan, et il diffère à se décider sur cette province, dont il sera toujours maître quand les Français n’y seront plus. Les troupes impériales entrent dans la Champagne : le connétable de Bourbon, dont les desseins sont découverts, fuit, et va commander pour l’empereur en Italie.

Au milieu de ces grands troubles, une petite guerre s’élève entre l’électeur de Trêves et la noblesse d’Alsace, comme un petit tourbillon qui s’agite dans un grand. Charles-Quint est trop occupé de ses vastes desseins et de la multitude de ses intérêts pour penser à pacifier ces querelles passagères.

Clément VII succède à Adrien le 29 novembre[2] ; il était de la maison de Médicis. Son pontificat est éternellement remarquable par ses malheureuses intrigues et par sa faiblesse, qui causèrent depuis le pillage de Rome, que saccagea l’armée de Charles-Quint, par la perte de la liberté des Florentins, et par l’irrévocable défection de l’Angleterre arrachée à l’Église romaine.

1524. Clément VII commence par envoyer à la diète de Nuremberg un légat pour armer l’Allemagne contre Soliman, et pour répondre à un écrit intitulé les Cent Griefs contre la cour de Rome. Il ne réussit ni à l’un ni à l’autre.

Il n’était pas extraordinaire qu’Adrien, précepteur et depuis ministre de Charles-Quint, né avec le génie d’un subalterne, fût entré dans la ligue qui devait rendre l’empereur maître absolu de l’Italie, et bientôt de l’Europe. Clément VII eut d’abord le courage de se détacher de cette ligue, espérant tenir la balance égale.

Il y avait alors un homme de sa famille qui était véritablement un grand homme : c’est Jean de Médicis, général de Charles-Quint. Il commandait pour l’empereur en Italie avec le conné-

  1. Voltaire se prononce ici en toute franchise sur le connétable. Dans l’Essai, au contraire, la trahison est presque niée. Voyez tome XII, page 256.
  2. Robertson cite le 28 ; des ouvrages estimés citent le 19 (Cl.)