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FERDINAND III.

rend maître ; et à la seconde bataille, il détruit toute l’armée de Jean de Vert, célèbre général de l’empereur ; il le fait prisonnier avec tous les officiers généraux. Jean de Vert est envoyé à Paris. Veimar assiége Brisach ; il gagne une troisième bataille, aidé du maréchal de Guébriant[1] et du vicomte de Turenne, contre le général Gœuts ; il en donne une quatrième contre le duc de Lorraine Charles IV, qui, comme Veimar, n’avait pour tout État que son armée.

Après avoir remporté quatre victoires en moins de quatre mois, il prend, le 18 décembre, la forteresse de Brisach, regardée alors comme la clef de l’Alsace.

Le comte palatin, Charles-Louis, qui avait enfin rassemblé quelques troupes, et qui brûlait de devoir son rétablissement à son épée, n’est pas si heureux en Vestphalie, où les Impériaux défont sa faible armée ; mais les Suédois, sous le général Bannier, font de nouvelles conquêtes en Poméranie. La première année du règne de Ferdinand III n’est presque célèbre que par des disgrâces.

1639. La fortune de la maison d’Autriche la délivre de Bernard de Veimar[2], comme elle l’avait délivrée de Gustave-Adolphe. Il meurt de maladie, à la fleur de son âge, le 18 juillet ; il n’était âgé que de trente-cinq ans.

Il laissait pour héritage son armée et ses conquêtes : cette armée était à la vérité soudoyée secrètement par la France ; mais elle appartenait à Veimar ; elle n’avait fait serment qu’à lui. Il faut négocier avec cette armée pour qu’elle passe au service de la France, et non à celui de la Suède : la laisser aux Suédois, c’était dépendre de son allié. Le maréchal de Guébriant achète le serment de ces troupes, et Louis XIII est le maître de cette armée veimarienne, de l’Alsace, et du Brisgau, à peu de chose près.

Les traités et l’argent faisaient tout pour lui ; il disposait de la Hesse entière, province qui fournit de bons soldats. La célèbre Amélie de Hanau, landgrave douairière, l’héroïne de son temps[3], entretenait, à l’aide de quelques subsides de la France, une armée de dix mille hommes dans ce pays ruiné qu’elle avait rétabli ; jouissant à la fois de cette considération que donnent toutes les vertus de son sexe, et de la gloire d’être un chef de parti redoutable.

  1. Le comte de Guébriant ne reçut le bâton de maréchal qu’en mars 1642.
  2. Ce grand capitaine, né à Veimar, le 6 auguste 1604, était le neuvième fils de Jean, duc de Saxe-Weimar.
  3. Amélie-Élisabeth de Hanau, née en janvier 1602, veuve, en 1637, de Guillaume V, landgrave de Hesse, morte à Cassel le 8 auguste 1651.