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ANNALES DE L’EMPIRE.

et le comte d’Avaux écrivait à l’électeur de Brandebourg : Monsieur[1], j’ai fait ce que j’ai pu pour vous servir. On qualifiait d’ordinaire les états généraux des Provinces-Unies, les sieurs états, quand c’était le roi de France qui parlait ; et même quand le comte d’Avaux alla de Munster en Hollande, en 1644, il ne les appela jamais que messieurs. Ils ne purent obtenir que leurs plénipotentiaires eussent le titre d’excellence. Le comte d’Avaux avait refusé même ce nouveau titre à un ambassadeur de Venise, et ne le donna à Contarini que parce qu’il était médiateur. Les affaires furent retardées par ces prétentions et ces refus que les Romains nommaient gloriole, que tout le monde condamne quand on est sans caractère, et sur lesquels on insiste dès qu’on en a un.

Ces usages, ces titres, ces cérémonies, les dessus des lettres, les suscriptions, les formules, ont varié dans tous les temps. Souvent la négligence d’un secrétaire suffit pour fonder un titre. Les langues dans lesquelles on écrit établissent des formules qui passent ensuite dans d’autres langues où elles prennent un air étranger. Les empereurs, qui envoyaient, avant Rodolphe Ier, tous leurs mandats en latin, tutoyaient tous les princes dans cette langue qui admet cette grammaire. Ils ont continué à tutoyer les comtes de l’empire dans la langue allemande, qui réprouve ces expressions. On trouve partout de tels exemples, et ils ne tirent plus aujourd’hui à conséquence.

Les ministres médiateurs furent plutôt témoins qu’arbitres, surtout le nonce Chigi, qui ne fut là que pour voir l’Église sacrifiée. Il vit donner à la Suède luthérienne les diocèses de Brême et de Verden ; ceux de Magdebourg, d’Halberstadt, de Minden, de Cammin, à l’électeur de Brandebourg.

Les évêchés de Ratzbourg et de Schverin ne furent plus que des fiefs du duc de Mecklenbourg.

Les évêchés d’Osnabruck et de Lubeck ne furent pas à la vérité sécularisés, mais alternativement destinés à un évêque luthérien et à un évêque catholique ; règlement délicat qui n’aurait jamais pu avoir lieu dans les premiers troubles de religion, mais qui ne s’est pas démenti chez une nation naturellement tranquille, dans laquelle la fureur du fanatisme était éteinte.

La liberté de conscience fut établie dans toute l’Allemagne. Les sujets luthériens de l’empereur en Silésie eurent le droit de

  1. Ce monsieur était Frédéric-Guillaume Ier, bisaïeul du roi de Prusse Frédéric II. (Cl.)